[SYNTHESE] Le marché des bureaux en Ile-de-France ne connait pas la crise
Par Alexandre Foatelli | Le | Immobilier
Malgré l’inflation, la hausse des taux, l’instabilité géopolitique et les incertitudes qui planent sur l’économie pour 2023, les données du GIE Immostat pour le troisième trimestre 2022 montrent un marché de bureaux franciliens performant. Voici la synthèse des commentaires des brokers.
Comme à chaque trimestre, ImmoStat, Groupement d’Intérêt Economique réunissant les quatre principaux conseils en immobilier d’entreprise (BNP Paribas Real Estate, CBRE, JLL et Cushman & Wakefield) présente les grands indicateurs du marché de l’immobilier d’entreprise en Ile-de-France. Les données pour ce troisième trimestre 2022 témoignent que le marché des bureaux en Ile-de-France ne souffre pas du contexte économique incertain.
Les principaux indicateurs du marché immobilier d’entreprise
Demande placée
Fin septembre, la demande placée de bureaux en Ile-de-France s’élève à 1 488 300 m², ce qui représente une hausse de 20 % par rapport à la fin du mois de septembre 2021. Le troisième trimestre totalise à lui seul 459 900 m² s’inscrivant ainsi en hausse de 11 % par rapport au troisième trimestre 2021.
« Même si les perspectives économiques s’assombrissent en France, les utilisateurs de bureaux en Île-de-France continuent de concrétiser leurs projets immobiliers. L’offre disponible de qualité, doublée d’une forte volonté de changement de la part des utilisateurs nous permet d’être résolument confiants et prévoir un volume des transactions autour de 2,2 millions de mètres carrés sur l’ensemble de l’année 2022 », précise Eric Siesse, directeur général adjoint en charge du pôle Bureaux Location Île-de-France de BNP Paribas Real Estate Transaction France.
Le marché des grandes surfaces (plus de 5 000 m²) confirme son rebond, totalisant 451 000 m² pour 43 transactions (vs 36 transactions un an auparavant). « Cette dynamique devrait se poursuivre au 4e trimestre où nous recensons une vingtaine d’opérations en cours de négociation », complète Eric Siesse. Le segment des petites surfaces confirme son dynamisme, avec 561 600 m² commercialisés depuis le début de l’année, soit 9 % de plus que la moyenne décennale. Les transactions mid-markets affichent quant à elles un résultat légèrement supérieur à la moyenne (+3 %) avec 475 400 m² de demande placée.
Par secteur géographique, le Quartier Central des Affaires (QCA) de Paris poursuit sa dynamique (+19 % sur un an) pour un volume global de 337 000 m². Paris hors QCA se démarque également cette année avec 391 000 m², en progression de 67 % sur un an. Signe de la dynamique parisienne, le marché intra-muros représente près de la moitié du volume global francilien. Autre logique de centralité, La Défense confirme sa dynamique avec un volume global de 141 000 m² après neuf mois (+16 % comparativement à sa moyenne long terme). Après une période d’attentisme, les Premières Couronnes rebondissent, en hausse de 25 % sur un an, mais toujours légèrement en deçà de leur moyenne long terme (-9 %) quand le Croissant Ouest amorce son rebond (+7 % sur un an).
« Le marché reste animé par le déploiement de solutions de travail hybrides et par des entreprises saisissant l’opportunité de se repositionner dans des secteurs plus centraux et sur des immeubles répondant aux obligations RSE et aux contraintes induites par le décret tertiaire », commente Yannis de Francesco, Directeur Exécutif Agence Bureaux Ile-de-France chez JLL.
Offre immédiate
L’offre immédiate de bureaux en Ile-de-France au 30 septembre 2022 s’établit à 4 111 000 m², en hausse de 3 % par rapport à son niveau il y a un an, pour un taux de vacance de 7,5 %. Les marchés les plus dynamiques continuent de voir leur offre diminuer, tandis que la plupart des marchés périphériques, déjà en suroffre, voient de nouveau leur stock de bureaux immédiatement disponibles augmenter.
« Cette stabilisation de l’offre immédiate disponible masque des tendances divergentes. D’un côté, la vacance continue de se contraindre dans les secteurs les plus attractifs. De l’autre, des pressions à la hausse se font sentir sur certains bassins tertiaires, déjà sur-offreurs, en raison de la livraison de programmes neufs/restructurés en attente de preneurs. Cette dichotomie et ce maintien de l’offre vacante à haut niveau en Ile-de-France devrait perdurer encore plusieurs trimestres », souligne ajoute Alexandre Fontaine, Executive Director Bureaux Ile-de-France chez CBRE.
Loyers
Sur la base des transactions ayant eu lieu au cours du trimestre, le loyer facial des bureaux atteint en moyenne 427 € HT HC/m²/an pour les biens de seconde main, soit une hausse de 6 % sur un an ; 426 € HT HC/m²/an pour les biens neufs ou restructurés, soit une hausse de 2 % sur un an.
La forte demande pour les secteurs les plus centraux se traduit dans les loyers, avec des valeurs moyennes qui atteignent des niveaux inédits sur plusieurs secteurs, à 666 € dans le QCA, 588 € dans Paris Centre Ouest, 542 € à Paris 3/4/10/11 et 442 € à Neuilly-Levallois, et des valeurs prime stables ou orientées à la hausse sur les secteurs les plus demandés. Dans le QCA, plusieurs transactions d’envergure ont été signées à des valeurs supérieures à 930 € au cours des derniers mois tandis qu’à La Défense, les données des brokers relèvent plusieurs signatures réalisées à une valeur de 600 €.
Investissement
En France, le montant global des investissements en immobilier d’entreprise au T3 2022 atteint 7,4 milliards d’euros, soit une hausse de 24 % par rapport au T3 2021. Le volume arrêté du montant de l’investissement depuis le début de 2022 s’établit ainsi à 19,7 milliards d’euros, en hausse de 34 % par rapport au même cumul l’an dernier.
En Ile-de-France, le montant global des investissements en immobilier d’entreprise pour le T3 2022 est de 5 milliards d’euros, soit une hausse de 57 % par rapport au T3 2021. Le volume arrêté du montant de l’investissement depuis le début de 2022 s’établit ainsi à 12,7 milliards d’euros, en hausse de 44 % par rapport au même cumul l’an dernier. Le prix moyen des bureaux achetés en Ile-de-France au cours du T3 2022, tous types confondus, s’élève à 8 240 €/m² (droits inclus), ce qui représente une hausse de 2 % sur un an.
Pour Stephan von Barczy, directeur du Département Investissement de JLL, le marché est « clairement entré en phase de price discovery », c’est-à-dire de désaccord entre vendeurs et acquéreurs sur le « bon prix », depuis le début de l’été, et les effets de cette nouvelle phase vont fortement impacter les volumes attendus du quatrième trimestre.
« Nous observons un décalage entre le ressenti du secteur et les résultats du trimestre qui vient de s’écouler, témoignant, et c’est normal, de l’inertie du marché, commente Nicolas Verdillon, Managing Director Investment Properties chez CBRE. Il y a même eu un phénomène d’accélération de certaines opérations pour les concrétiser avant le ‘reset’ du marché, autrement dit la phase d’ajustement, qui ne sera sans doute visible réellement que d’ici 3 à 6 mois », ajoute-t-il.
« Même si l’immobilier garde de solides fondamentaux sur les marchés utilisateurs, la très forte réduction de la prime de risque immobilière pourrait continuer à impacter les prix à court terme. Seule une hausse des valeurs locatives, notamment sur les marchés les plus tendus, pourrait réduire cet impact sur la performance immobilière globale », anticipe Olivier Ambrosiali, directeur général adjoint en charge du pôle Vente de BNP Paribas Real Estate Transaction France.