Quand la « valeur verte » agit sur les loyers de bureaux
Par Alexandre Foatelli | Le | Immobilier
Comprendre la corrélation qui existe entre les certifications environnementales et les niveaux de loyers, c’est l’ambition que s’est fixée CBRE à travers son étude « Les certifications environnementales, un moteur de création de valeur ? ». Un nouveau travail qui tisse un lien entre les performances environnementales d’un actif et sa valorisation.
La grande valse des standards de l’immobilier de bureau n’en fini pas d’interroger les acteurs du secteur sur les bons indicateurs à suivre. Emplacement, offre de services, esthétique, engagement performances énergétiques… les frontières qui définissent la valeur d’un immeuble tertiaire se font mouvantes. Sur le plan environnemental, par exemple, les immeubles aux performances solides sont, pour la plupart, des immeubles neufs, considérés comme des actifs premium. Dès lors, il s’avère difficile de pouvoir identifier la part de la ou des certifications dans la valeur in fine, alors que la part des immeubles certifiés ne fait que progresser, passant de 11 % en 2016 à 20 % mi-2021. En d’autres termes, surcroit de performances environnementales rime-t-il avec des performances locatives accrues ?
Prime de 21 %
CBRE a effectué une analyse fondée sur le plus grand nombre d’immeubles possible à travers 15 villes situées dans 12 pays européens. Celle-ci a été faite sur la base de comparaison, ayant pour but de mieux comprendre les critères de « valeur verte », dont les certifications environnementales (Breeam, Leed, HQE, Well, etc.) ne constituent qu’une des composantes. « Des recherches supplémentaires seront nécessaires dans l’ensemble de l’industrie pour quantifier pleinement la valeur de ces marques de qualité », précise Ludovic Chambe, directeur RSE et Développement Durable Europe continentale de CBRE.
En moyenne, CBRE a constaté une prime de loyer de 21 % pour les immeubles de bureaux certifiés par rapport aux actifs non certifiés, sur une période de cinq ans. Une prime qui se situe plutôt autour de 18 % pour Lyon et de 15 % pour Paris, dont la caractéristique est que la part du stock d’immeubles certifiés reste relativement faible par rapport à d’autres marchés tels que Copenhague, Barcelone ou Amsterdam, où la prime atteint respectivement 29 %, 27 % et 26 %. « La prime locative est largement motivée par les avantages associés aux bâtiments durables, notamment la baisse des coûts d’exploitation, l’amélioration de la réputation de l’entreprise et l’augmentation du confort, du bien-être et de la productivité des occupants », précise l’étude.
Des bureaux plus demandés
« Cette première analyse démontre clairement que les avantages associés aux bâtiments durables sont capitalisés dans la valeur marchande. Alors que les engagements de décarbonation augmentent à travers le monde, nous nous attendons à ce que la demande de bâtiments durables s’accélère », souligne Ludovic Chambe.
L’activité locative est de plus en plus liée à la stratégie RSE des utilisateurs.
Les données vont dans ce sens, puisqu’au cours des cinq dernières années, la demande placée d’immeubles de bureaux certifiés a largement suivi le mouvement, puisqu’elle est également passée de 24 % du marché à 31 % sur les principaux marchés européens. Des chiffres confirmant la tendance : l’activité locative est de plus en plus liée à la stratégie RSE des utilisateurs.
Cependant, ce niveau de demande cache des disparités géographiques importantes soulignées par CBRE. En effet, la demande placée est également contrainte par l’offre effectivement disponible. Ainsi, la faible proportion de la demande placée certifiée constatée à Copenhague et Lisbonne, par exemple, s’explique par une offre certifiée plus faible. Au 1S 2021, la part de surfaces certifiées dans la demande placée totale oscille entre 5 % à Copenhague contre 81 % à Bratislava !
À l’avenir, les politiques ESG amplifieront encore l’écart entre les taux de vacance entre le parc certifié et l’ensemble du parc.
Dernier élément, les bâtiments certifiés présentent des taux de vacance inférieurs et une vitesse de location plus élevée que la moyenne du marché local, dans toutes les villes d’Europe continentale analysées par CBRE. L’écart de performance est particulièrement frappant en France : à Paris et à Lyon, le taux de vacance sur les stocks certifiés s’établit respectivement à 1,5 % et 0,5 % au premier semestre 2021, contre 6,7 % et 4,8 % pour l’ensemble du marché. « À l’avenir, les politiques ESG amplifieront encore l’écart entre les taux de vacance entre le parc certifié et l’ensemble du parc, anticipe le broker. Autre fait marquant constaté, les immeubles certifiés sont souvent loués avant leur livraison effective. Avec le temps cette tendance pourrait s’accentuer, notamment sur les marchés où la demande de bureaux certifiés dépasse l’offre disponible. » L’écart entre immeubles vertueux et dispendieux semblent donc se creuser sur tous les plans.