Confiance, espaces adaptés et outils numériques : les ingrédients pour un travail hybride apprécié
Par Alexandre Foatelli | Le | Modes de travail
Julhiet Sterwen, cabinet de conseil en stratégie, transformation et innovation, publie son 7e Baromètre Phygital Workplace, réalisé avec l’Ifop. Ce dernier analyse l’évolution de la perception des salariés en matière d’organisation, de management, d’outils et d’environnement de travail. Voici les enseignements.
Comment les salariés vivent la transformation digitale de leur entreprise ? Quelle expérience font-ils d’un monde de plus en plus phygital ? Font-ils confiance à leurs managers ? Qu’est-ce qui pousse à retourner physiquement dans son entreprise ? Quel est l’espace le plus adéquat pour (télé)travailler ?… Autant de questions auxquelles tente de répondre la 7e édition du Baromètre Phygital Workplace publiée par le cabinet Julhiet Sterwen, réalisé en partenariat avec l’Ifop.
Managers & équipes : divergence de points de vue
Collaborateurs et managers s’accordent à penser que les outils, la confiance et l’autonomie sont les trois facteurs clés à la réussite de la mise en place du travail hybride. Cependant, le premier constat est que les écarts se creusent sur la perception des uns et des autres. Si certains collaborateurs ont définitivement intégré l’hybridation dans leur mode de vie et s’y sont bien adaptés, ce n’est pas le cas de tout le monde.
En effet, les managers sont plus nombreux que les salariés sans rôle managérial à considérer que la transformation numérique renforce les liens au sein de l’équipe. Un des éléments sur lesquels subalternes et managers n’ont pas du tout la même perception dans le cadre du travail hybride, c’est la confiance. En la matière, 60 % des collaborateurs perçoivent recevoir plus de confiance, contre 87 % des managers qui pensent en faire preuve. La moitié des managers estime que l’hybridation du travail rend plus complexe le management d’équipe, 76 % d’entre eux s’orientent vers un rôle de « Manager coach ».
« Les collaborateurs se sentent majoritairement à l’aise dans l’organisation hybride, tandis que les managers attendent encore un retour au présentiel. Il est plus que temps de renverser le modèle historique du management, au risque d’un appauvrissement du lien hiérarchique dans les entreprises, prévient Julien Lever, Managing Partner chez Julhiet Sterwen. Posons-nous les bonnes questions : où sont les vraies priorités ? S’agit-il réellement de faire revenir tous les collaborateurs au bureau ? Ou de réinventer le contrat social qui lie collaborateurs, managers et organisation ? », interroge-t-il.
Ainsi, ce baromètre montre un écart non négligeable dans la perception du télétravail entre collaborateurs & managers. Pendant que les premiers attendent plus de flexibilité et de confiance, et donc de revenir au bureau à bon escient seulement, les seconds semblent vouloir reconquérir le bureau, symbole de leur mode d’animation et supervision d’équipe. Cependant, tout le monde ou presque (82 %) s’accorde à dire que le travail hybride offre un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle. 13 % des salariés apprécient même de pouvoir travailler à n’importe quelle heure et 40 % trouvent ce système plus souple qu’avant.
Télétravail : entre plébiscite et craintes
D’après le sondage effectué, 64 % des salariés bénéficient désormais d’un accord de télétravail. Lorsqu’ils ne travaillent pas, le plus souvent, c’est en raison d’une impossibilité technique (89 %) : leur métier ne peut s’effectuer en télétravail. Pour ceux qui ont la possibilité théorique de télétravailler, qu’est-ce qui les motive à se rendre physiquement dans les locaux de leur entreprise ? Pour 48 % d’entre eux il s’agit… d’une obligation ! Au-delà de cette directive, le contact social avec des collègues est particulièrement apprécié, notamment chez les managers (39 %).
Dans cette nouvelle édition du baromètre, la grande majorité des répondants (87 %) déclare que leur domicile offre un espace de travail pertinent en termes d’efficacité, de concentration et de créativité, aussi bien chez les managers que les autres salariés. À noter que le recours aux tiers-lieux et aux espaces de coworking ne concerne que 6 % des salariés et 13 % des managers, ce qui tend à montrer que cet usage est encore loin de trouver son public au sein de cette typologie d’utilisateurs. En revanche, « l’open space est largement boudé, on lui préfère toutes les autres configurations possibles », souligne Isabelle Trevilly, directrice du Pôle Média & Digital de l’Ifop. Le bureau individuel ou partagé récolte bien plus d’opinion favorable, notamment pour la concentration et la créativite.
Si l’hybridation possède son lot de bienfaits, elle connait également certaines limites : la responsabilisation et l’autonomisation riment parfois avec une moins bonne détection des signaux faibles. Le risque de désengagement est toujours présent chez 60 % managers, à fortiori ceux qui ne sont pas à l’aise avec le management hybride. En outre, il est difficile d’évaluer l’engagement ou la véritable charge de travail des collaborateurs à distance, confessent 60 % des managers.
Le management pose le sujet de la coopération de l’équipe en asynchrone. Si cela reste relativement aisé avec un petit groupe de personnes, grâce à un bon niveau d’interconnaissance, d’automatismes préalables et de sens de responsabilités réciproques, le passage à l’échelle supérieure est une autre histoire, qui interroge encore beaucoup les organisations.
Les outils numériques : peut mieux faire
Les collaborateurs, et plus encore les managers, soulignent de manière croissante l’importance des outils collaboratifs dans leur organisation de travail hybride. Ces derniers sont désormais entrés dans les mœurs puisque 2/3 des salariés en sont aujourd’hui équipés et la moitié les utilisent quotidiennement. Seuls 16 % de celles et ceux qui ont accès à ces outils les utilisent depuis moins d’un an.
Pour répondre aux nouveaux besoins liés au travail à distance, les entreprises continuent à accélérer la dotation d’outils de mobilité amorcée avec la crise sanitaire ordinateurs portables, tablettes, smartphones. En outre la satisfaction des salariés est au rendez-vous, la grande majorité disant disposer des outils adaptés pour travailler efficacement quel que soit la situation. L’enjeu se trouve aujourd’hui dans l’adoption des bons outils selon les bons usages plus que de déploiement de masse : les managers plébiscitent des accompagnements personnalisés qui font progresser les collaborateurs, émerger de nouvelles pratiques métier en équipe et, pour eux-mêmes, manager des équipes hybrides efficacement.
En revanche, les initiatives des entreprises sur les technologies émergentes sont encore timides. Pour preuve, 78 % des collaborateurs sondés n’ont jamais entendu parler de réalité virtuelle ou augmentée, d’aide à la décision via l’intelligence artificielle, du métavers ou encore des robots sociaux type Pepper. Si les managers y voient de plus en plus un moyen de passer de nouveaux caps dans la mise en place du Future of work en allant chercher des usages métiers à plus forte valeur ajoutée, « ces technologies ne répondent pas à des besoins concrets des salariés, indique David Gautron, Associate Partner-Leader Expertise Phygital Employee Expérience chez Julhiet Sterwen. Plusieurs entreprises mettent en œuvre des observatoires afin de faire un audit de ce qui fonctionne et ne fonctionne pas, afin de prendre les meilleures décisions », poursuit-il.
À l’image des postures managériales et des espaces privilégiés pour œuvrer, les outils numériques doivent encore évoluer pour que la mise en place du travail hybride puisse satisfaire les collaborateurs et leurs managers.
Méthodologie :
Etude quantitative ad hoc, réalisée selon un mode de recueil online du 7 au 20 décembre 2022. Echantillon représentatif de 1 000 collaborateurs d’entreprises de 500 salariés et + (dont 349 managers) ; Suréchantillon de 307 managers dans des entreprises 500 salariés et +.