Marginalement ou structurellement, tous les emplois peuvent être impactés par l’IA

300 millions.  Tel est le nombre d’emplois à temps plein d’ores et déjà impactés par l’IA, d’après une étude réalisée par Goldman Sachs. Afin de concevoir les perspectives du développement de l’intelligence artificielle dans le monde de travail, notamment en France, Indeed dévoile quelques éléments de réponse via AI at Work, une série de rapports de recherche du Hiring Lab dédiée à l’impact de l’intelligence artificielle sur l’emploi.

L’IA dans le recrutement : la France à la traîne

Parmi tous les pays occidentaux étudiés par la plateforme de recrutement et de matching dans le cadre de cette recherche*, la part des offres mentionnant des compétences en IA la plus faible est en France : 1,2 % fin août 2023 vs 1,6 % pour le Royaume-Uni ou l’Allemagne. Pis, la part de l’IA dans les offres d’emploi en France n’a pas augmenté sur la période 2019-2022, contrairement à tous les autres pays étudiés. Celle-ci est restée comprise entre 1,3 % et 1,7 % des offres, quand la part en Allemagne, par exemple, a atteint 2,3 % en mai 2022 contre 1,4 % en janvier 2019.

En examinant les offres d’emploi contenant des mots-clés spécifiques à l’IA générative (GenAI), Indeed observe une forte croissance à partir du début de 2023. Par exemple, à la fin du mois d’août, 0,05 % de toutes les offres d’emploi américaines contenaient des termes spécifiques à la GenAI, soit une multiplication par cinq au cours des quatre derniers mois seulement. Des tendances similaires se manifestent dans d’autres pays, avec une croissance rapide à partir d’une base quasi nulle. L’Irlande affiche une part particulièrement élevée d’offres d’emploi en GenAI (0,13 %), tandis que la France reste là encore en retrait avec seulement 0,02 % des offres.

« Cette stagnation relative de la présence de l’IA (générative ou pas) dans les offres d’emploi en France ne s’explique toutefois que par la conjoncture peu propice au secteur de la tech. Elle n’enraye en aucun cas la tendance de fond qu’est l’incorporation croissante et inéluctable de l’IA dans le monde du travail », précise toutefois Indeed.

Aucun poste « épargné » par l’IA générative

En analysant plus de 55 millions d’offres d’emploi publiées au cours de l’année écoulée, Indeed a identifié plus de 2 600 savoir-faire individuels, regroupés en 48 familles de compétences. Via l’étude AI at Work, Indeed a ensuite demandé à Chat GPT d’évaluer sa capacité à exécuter chaque famille de compétences. La plateforme de recrutement en tire plusieurs conclusions.

La première, c’est que 100 % des emplois affichés sur Indeed sont ou seront exposés à l’IA. Cependant, le niveau d’exposition varie fortement. Tandis que 80,2 % des postes sont faiblement/modérément exposés, c’est-à-dire que l’IA peut exécuter moins de 50 % de manière satisfaisante, 19,8 % des emplois le sont fortement. Autre raison de relativiser l’impact, sur les 48 familles de compétences jugées, l’IA générative se déclare « excellente » dans seulement 4 d’entre elles, et « bonne » dans 16 autres. Ainsi, une majorité de familles de compétences analysées ne peuvent pas compter sur le savoir-faire de l’IA pour le moment.

Spécifiquement, les emplois les plus menacés sont ceux liés à l’administration d’une entreprise : il semble que l’IA puisse les remplacer dans pratiquement 90 % de leurs tâches, car beaucoup d’entre elles peuvent être automatisées assez facilement. Les compétences technologiques font partie des compétences que l’IA générative est la plus à même de transformer, car elles représentent 82 % des compétences mentionnées dans un poste de développeur. La GenAI se déclare ainsi « bonne » ou « excellente » pour plus de 95 % de toutes les compétences spécifiées dans les offres d’emploi liées au développement. Or, environ une compétence sur cinq (18,4 %) mentionnée dans une offre d’emploi Indeed est une compétence technologique, et près de 40 % des plus de 2 600 compétences individuelles identifiées pour cette analyse relèvent de la famille des « compétences technologiques ».

« L’IA ne peut pas être vue comme un simple envahisseur venu remplacer l’emploi tel qu’on le conçoit aujourd’hui. Elle doit être perçue également comme un outil permettant de libérer un plus grand potentiel humain dans le cadre d’un processus de recrutement, et comme un générateur de nouveaux emplois qu’on ne soupçonne pas encore. Au vu des mots-clés étudiés à travers les offres publiées, la France semble freiner des quatre fers, comparé à ses voisins européens et occidentaux. Pour autant, l’inertie vers l’IA est irréversible », résume Indeed.

En somme, si l’IA générative peut influencer la plupart des emplois, il s’agit davantage d’augmenter, assister ou transformer des tâches spécifiques de les remplacer entièrement.

^{* Etats-Unis, Australie, Allemagne, Irlande, Canada, Espagne et Royaume-Uni.}