Stratégies

De l’immobilier à l’expérience collaborateur : comment TF1 a redéfini son environnement de travail

Par Alexandre Foatelli | Le | Environnement de travail

Menée par sa Direction des Affaires Générales et Sécurité (DAGS), la refonte de l’environnement de travail du groupe TF1 a été récemment achevée symboliquement par la libération d’un bâtiment et la réaffectation des salariés au sein du siège historique. Retour sur le déroulé du projet avec ceux qui l’ont conduit.

La tour TF1, à Boulogne-Billancourt, est le siège du groupe TF1 depuis 1992. - © Frédéric Berthet
La tour TF1, à Boulogne-Billancourt, est le siège du groupe TF1 depuis 1992. - © Frédéric Berthet

Depuis la privatisation de la première chaîne de télévision de France en 1987, le groupe TF1 n’a eu de cesse de contribuer à l’évolution de son média, que ce soit par la création d’émissions devenues cultes ou par l’adaptation avant-gardiste aux usages : première chaîne d’information en continue de France (LCI), site web dès 1995 ou encore son service VOD dès 2005.

Précurseuse, la première chaîne d’Europe l’a aussi été dans sa stratégie immobilière en repensant totalement son environnement de travail dès 2017, avec une approche qui s’est avérée en adéquation avec les modes de travail issues de la crise sanitaire de 2020 et de la mise en place du télétravail. Pari réussi donc pour la Direction des Affaires Générales et Sécurité (DAGS) du groupe audiovisuel, qui doit aussi composer avec des enjeux de performance énergétique.

Ciel, mon bureau !

« Ce programme a connu deux grandes phases : d’abord le passage d’un modèle avec un bureau fixe attribué à chaque collaborateur à un flex office généralisé, amorcé en 2017, puis, à la suite des conséquences de la pratique du télétravail post-Covid, une phase de densification des plateaux », relate Thierry Michalak, directeur des Affaires générales, sécurité et Immobilier Groupe.

« Le projet a été impulsé par le PDG de l’époque, qui souhaitait encourager la transversalité entre les services, apporter de l’agilité dans les modes de travail et montrer des signes de transformation de l’entreprise, précise Shirley Ligneul, directrice de Projets de Transformation et Conduite du changement. C’était aussi l’occasion de réaménager et rénover des locaux qui n’avaient pas connu d’évolutions majeures depuis leur inauguration en 1992 ! »

Initialement, un plateau accueillant 100 personnes possédait 100 postes fixes. Lors de la première phase, en 2017, le travail engagé consistait à faire accepter que ce même plateau pût fonctionner avec 80 postes en flex, agrémentés d’espaces alternatifs (espaces de « coworking », zones « bibliothèques », phone box, « creative room » …).

C’était aussi l’occasion de réaménager et rénover des locaux qui n’avaient pas connu d’évolutions majeures depuis 1992 !

Après le passage du Covid et la mise en place du télétravail pour une grande partie des collaborateurs, la DAGS constate que le taux de fréquentation n’excède pas les 70 % (estimation haute basée sur les pics de présence), d’où la phase de densification.

« En prenant en compte ce taux de présence réelle, nous avons donc pu affecter davantage de personnes par étage. Ainsi, avec 140 personnes rattachées à un plateau en espaces dynamiques, nous avons environ une centaine de présents lors des pics d’affluence, ce qui correspond au capacitaire des lieux, en utilisant toutes les positions de travail proposées », explique Shirley Ligneul.

La transition vers le flex office est nécessairement allée de pair avec l’équipement de chaque collaborateur avec des outils mobiles. Ainsi, entre l’acculturation au « work from anywhere » et la mise à disposition des instruments pour le faire efficacement, le groupe TF1 était prêt à affronter les défis qui allaient se poser aux entreprises en 2019 et 2020. « Quelques mois après, le mouvement social contre la réforme des retraites a débuté. Entre les perturbations sur le réseau de transport en commun et les grèves dans le primaire, les gens ont dû ponctuellement travailler de chez eux… et ils avaient les moyens techniques de le faire », se souvient Thierry Michalak, qui œuvrait à l’époque du côté de la DSI. De même, lorsque le premier confinement strict se produit, la chaîne n’a donc pas eu trop de peine à s’adapter.

Le groupe TF1 était prêt à affronter les défis qui allaient se poser aux entreprises en 2019 et 2020.

Dans une entreprise où l’environnement de travail avait connu une certaine inertie depuis 1992, révolutionner les usages des salariés, qui plus est avant l’expérience généralisée du télétravail, n’avait rien d’aisé. En outre, « tous les travaux d’aménagements ont été réalisés en site occupé », précise Annabelle Thomas, directrice adjointe des Affaires Générales, ajoutant à la complexité des opérations.

Abords du plateau du JT de TF1 - © D.R.
Abords du plateau du JT de TF1 - © D.R.

Zone bibliothèque et tables de coworking - © D.R.
Zone bibliothèque et tables de coworking - © D.R.

Pour réussir la conduite du changement, TF1 a pu miser sur un ingrédient précieux : le temps. Associé à l’écoute des collaborateurs et un échange constant avec nos organisations syndicales, ce process a permis de mener à bien le projet sans conflit majeur, comme le décrit Shirley Ligneul. « Nous avons mis en place une méthode en interne, qui s’est appuyée sur des entretiens individuels avec des représentants de chaque service, comprenant des managers et des employés, des partisans du changement et des réfractaires. Lors de la présentation des projets finaux, nous prenions le temps de justifier nos choix lorsque les demandes exprimées n’avaient pas pu être satisfaites. À l’issue des travaux d’un étage, les équipes concernées étaient invitées à visiter les lieux avant afin de se familiariser avec », déroule la directrice de Projets.

Qui veut gagner des mètres carrés ?

Contrairement à bon nombre d’organisations qui l’ont entreprise récemment, la refonte des environnements de travail de TF1 n’avait donc pas pour but initial de réduire l’empreinte immobilière. Dans son siège de Boulogne-Billancourt, le groupe occupe encore 36 000 m², dont 23 000 m² de bureaux recevant en moyenne 2 000 collaborateurs, internes (environ 1 100) et externes (prestataires, intermittents, intérimaires).

Néanmoins, en ayant enclenché la réinvention de ses espaces de travail dès 2017, TF1 a pu envisager dès 2020 de quitter un bâtiment entier. C’est ainsi que L’Atrium, immeuble de 20 000 m² qui abritait 500 salariés (et d’autres de Bouygues Télécom, NDLR), a été libéré en 2023. « Le défi était double, car il fallait être capable d’intégrer ces collaborateurs au sein de la tour TF1, et de le faire à temps avant la reconduction du bail de L’Atrium pour trois ans », explique Thierry Michalak. Un double défi réussi grâce à tout le travail mené en amont par la DAGS.

La roue des services

En réaménageant totalement ses locaux, TF1 a voulu les rendre aussi plus agréables pour ses occupants. Les espaces libérés par le passage en espaces dynamiques a permis l’apparition de moult zones alternatives, donnant accès à une palette de postures et d’environnement. L’environnement de travail se veut aussi plus soucieux du bien-être des salariés : à titre d’exemple, tous les benchs sont disposés à proximité des fenêtres et les box sont entièrement vitrées - sans perdre en qualité d’insonorisation - afin de garantir un accès à la lumière naturelle et une échappée sur l’extérieur permettant le repos visuel.

Les bureaux comportent des slogans inspirés des émissions de TF1, vecteurs de l’identité du groupe - © Frédeéic Berthet
Les bureaux comportent des slogans inspirés des émissions de TF1, vecteurs de l’identité du groupe - © Frédeéic Berthet

L’environnement de travail est un levier significatif sur les sujets d’attractivité et de rétention des talents.

Autant d’éléments importants, car malgré son statut de première chaîne de télévision de France et d’Europe, TF1 n’est pas épargnée par la problématique d’attractivité et de rétention des talents. « L’environnement de travail est un levier significatif sur ces sujets, affirme Thierry Michalak. Pour les jeunes générations, le premier critère d’appréciation d’un job, c’est l’équilibre entre la vie pro et le temps personnel. Cela passe par la flexibilité dans les modes d’organisation du travail, mais aussi par le fait d’offrir un cadre de services aux collaborateurs qui jouent ce rôle », décrit le directeur de la DAGS.

Les salariés du groupe TF1 bénéficient donc d’une panoplie de services, qui s’étend des attendus RIE et salles de sport jusqu’aux prestations de massage ostéopathique, en passant par le coiffeur, la cordonnerie, l’opticien, un distributeur de fournitures élémentaires (tickets de métro, timbres, mouchoirs, protections périodiques…) ou encore la mise à disposition d’une petite flotte de véhicules électriques en libre-service pour un déplacement professionnel ou une course durant la journée. « Nous proposons tellement de petits services du quotidien que nous allons lancer une campagne de vidéos d’information car certains sont encore méconnus, comme la possibilité de poster son courrier sans aller au bureau de Poste », souligne Thierry Michalak.

La cafétéria du siège de TF1 - © D.R.
La cafétéria du siège de TF1 - © D.R.

Les nouveaux aménagements comportent un volet ludique, avec la présence de baby-foot et de bornes d’arcade. - © Christophe Chevalin/TF1
Les nouveaux aménagements comportent un volet ludique, avec la présence de baby-foot et de bornes d’arcade. - © Christophe Chevalin/TF1

Indéniablement, cette approche servicielle permet au groupe TF1 de séduire les talents. « Historiquement, le sentiment d’appartenance à l’entreprise a toujours été très fort au sein de l’entité, comme en témoigne notre ancienneté moyenne de 11,5 ans, indique Annabelle Thomas. L’environnement de travail et les nombreux services aux collaborateurs que nous proposons aujourd’hui contribuent à notre faible turnover sur les embauches récentes. »

En prenant le virage des nouvelles organisations du travail très tôt, TF1 a pu saisir toutes les opportunités d’adaptation sans vivre de choc brutal, et veut avoir les atouts pour être à la Une du future of work.

Performance énergétique : objectif 2030 déjà atteint

Abritant à la fois des activités tertiaires et des locaux techniques très énergivores, le siège de TF1 a pu grandement améliorer ses performances énergétiques en marge des travaux de réaménagement. « Certifié ISO 50001 dès 2018, le bâtiment a d’ores et déjà diminué ses consommations de 35 % par rapport à 2011. Se faisant, l’objectif visé pour 2030 est déjà atteint », précise Annabelle Thomas.

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